Bonjour,
Je viens de m'inscrire, ceci est mon tout premier message.
Cela fait plusieurs jours que je parcours le forum, et lire les discussions bienveillantes m'a donné l'espoir que je pourrais trouver ici des interlocuteurs.
Pour faire court : cela fait des années que je joue à cache-cache avec moi-même en essayant de fuir ou de minimiser le fait que je suis alcoolodépendant.
De temps à autre, histoire de vérifier où j'en suis, je m'inflige quelques jours d'abstinence. Je n'ai pas de symptômes physiques de sevrage. Alors ça me donne bonne conscience et je recommence. Divers événements survenus dans ma vie ces derniers mois m'ont permis de prendre conscience de certaines choses. Elles sont terriblement banales, mais je viens de les prendre en pleine figure brutalement. Et c'est douloureux.
La première chose, c'est que j'ai une hyper dépendance très forte à... "autrui". Si je regarde en arrière, je ne vois qu'une longue succession d'épisodes qui ont tous pour dénominateur commun que je me suis engagé corps et biens dans toute sorte de relations (amoureuses, amicales, professionnelles…) sans être capable de faire preuve de discernement, parfois dans des proportions qui relèvent de l'aveuglement. Relations mal choisies, mal équilibrées, qui se sont soldées par des échecs (ruptures, conflits, embrouilles diverses…). Sources de déceptions et de frustrations permanentes. Frustration du mail qui demeure sans réponse, du sms qui n'arrive pas, de la réponse inconsistante qui me laisse sur ma faim… La voix de la Sagesse me dit que j'attends trop des autres, que je demande trop. La Sagesse est bien gentille. Je me dis qu'elle a raison. Et cinq minutes après, je suis en train de mendier un bout de conversation avec la première personne que je croise, et je disperse mon énergie, et mon temps, (et le sien), et je repars pour une galère.
J'en suis venu depuis cet été à "couper les ponts" (sevrage relationnel) avec les quelques personnes qui pouvaient ressembler à des "amis" parce que j'ai pris conscience que leur fréquentation représentait davantage de frustrations que de satisfactions. Vous pourriez-me dire : et l'alcool, dans tout ça? C'est très simple: l'alcool est devenu l'ami qui répond toujours présent. Il trouve toujours mes blagues très drôles. (Ce qui prouve qu'il a bon goût). Et il partage mes émotions, lorsque je vois quelque chose qui me bouleverse, et mon enthousiasme quand un de mes musiciens préférés sort un nouvel album.
L'autre chose dont j'ai pris conscience, c'est que j'ai peur. Une pure diffuse. Peur qu'il arrive quelque chose à mes proches. Peur de la maladie. Peur de l'injustice. Peur de n'être pas à la hauteur. Le whisky est au fil des années devenu le pansement sur cette blessure permanente.
Il y a quelques jours, j'ai reçu une très mauvaise nouvelle.
Je suppose que l'on peut dire que ma réaction a été étrange. Je crois que pour une fois j'ai fait preuve de discernement. Ou plutôt d'instinct. J'ai eu en une fraction de seconde une "vision" assez claire de ce qui m'attendait. Cette très mauvaise nouvelle, avec toutes les conséquences pénibles qu'elle va avoir désormais sur ma vie, c'était le scénario idéal pour basculer encore davantage dans une consommation débridée, la dépression, et au bout le suicide. Alors je me suis fait prescrire du Selincro et j'ai commencé aussi sec (si j'ose dire). Il y aura 4 jours aujourd'hui. Il me semble que je parviens à diminuer ma consommation. Mais les nuits sont horribles. Je ne sais pas faire la part de ce qui doit être attribué à l'alcool, aux effets secondaires du Selincro, au stress provoqué par la mauvaise nouvelle. Je ne parviens pas à dormir, j'ai l'impression que le chauffage est poussé à fond (alors qu'il est éteint), et surtout, j'ai en permanence un défilé d'idées qui turbinent à plein régime sous mon crâne sans que je parvienne à l'arrêter. Je ne parviens pas à dormir et je suis épuisé. Moi qui suis depuis des années un grand consommateur de café, je suis devenu incapable d'en boire. Je remplace avec des tisanes, moi qui n'en buvais jamais.
Ce soir, je ne vais pas prendre de Selincro. Du moins pas à l'heure habituelle. Je suis patraque et je pense que je ne vais pas boire. Si jamais je craque, il me restera le recours de prendre un Selincro, j'ai lu qu'on pouvait faire ainsi.
On verra. Demain est (quelquefois) un autre jour.
Merci à qui aura pris le temps de me lire.