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10 ans

Par Profil supprimé

Ça fait longtemps que ça traîne en moi, que je ressasse, que je maudit ce passé.
Le chemin s'est fait petit à petit, la reconstruction de moi-même, un chantier immense, encore inachevé aujourd'hui.
Ce soir, mes émotions montent et descendent.
Même si je vois le chemin parcouru, je n'arrive pas à me trouver légitime, pas vraiment a ma place, toujours un peu différent.
Les alcooliques cultivent ça, un sentiment de différence, une culpabilité permanente vissée au corps et à l'âme.
Je ressens toujours ce besoin de m'excuser, comme me jugeant responsable du mal qui me ronge.
Cette maladie est la, toujours présente, parfois silencieuse et calme, parfois violente et vive comme un torrent.
Il y a plus de trois ans maintenant que je m'abstiens.
Des jours passent où c'est simple, facile même, je n'y pense pas.
D'autres sont complexes, presque insurmontables. Et je suis heureux quand vient le soir d'en avoir fini avec cette journée.
Il y a 10 ans, je touchais le fond.
Des médicaments plein la gorge et le ventre, je voulais partir, en finir avec une vie qui ne voulait plus rien dire.
C'était une tentative comme on dit, juste une tentative. Personnellement, je ne l'ai pas vécu ainsi.
Je cherchais une délivrance, un soulagement. Il n'est pas venu et je me suis trouvé sur un lit d'hôpital, enfermé car j'étais dangereux pour moi-même et pour mon jeune fils aussi.
Dans les jours et les semaines suivants j'ai essayé de revivre, de mettre un pas devant l'autre, péniblement.
Le sevrage n'aura pas tenu longtemps, et j'ai erré longtemps, entre rechutes brutales et profondes et périodes d'abstinence plus ou moins longues.
Il y a trois ans, au lendemain de mon anniversaire, je me suis décidé.
C'était la fois de Trop, je n'en voulais plus.
Mais je m'en voulais toujours, aujourd'hui encore je m'en veux.
Je sais que je ne suis plus cet homme là, mais je reste peureux, terrifié de moi-même, de ce que je peux être dans les pires moments.
Il y a deux ans, alors que tout semblait bien allé, j'ai découvert l'infidélité de ma compagne.
Nous nous sommes connus il y a 9 ans, j'étais sorti de l'hôpital, venu ici pour me rapprocher de mon garçon.
Elle est plus jeune que moi et nous avons eu des hauts et des ans, toujours à cause de mon addiction.
Nous avons eu un premier enfant ensemble, peut être trop tôt ou trop vite.
Lorsque je suis devenu abstinent, notre vie s'est assagie, et j'ai senti venir peu à peu une histoire, jusqu'à ce que j'en sois sur par un matin d'octobre.
Nous avons une courte période de séparation, de doutes, de questionnements.
J'ai tenu car je savais le danger d'une rechute, et dans l'état dans lequel j'étais, je ne voyais pas lui donner raison.
Je ne sais pas si c'était pour me tester, ou simplement par peur ou par lassitude, mais cette épreuve est arrivée.
Elle m'a fait un mal profond que je ressens toujours aujourd'hui et, en même temps, elle m'a renforcé dans mon abstinence.
L'alcool ne pouvait plus être ni un exutoire, ni une solution pour oublier la douleur de la trahison.
Nous avons repris notre vie commune, mis certaines choses à plat, tentéde terribles blessures infligées et reçues. J'ai essayé de pardonner.
Notre famille s'est agrandie, ma fille chérie est arrivée.
Le premier enfant, parmi les trois, ou j'étais sobre avant, pendant et après son arrivée.
Je me rends compte chaque jour des moments que j'ai gâché avec les autres en buvant encore et encore.
Alors, en cette nuit de ce triste anniversaire, je peux voir les effets du temps et de la volonté.
Comme.ma vie est plus simple et plus claire maintenant.
Se lever le matin est facile, profiter d'une journée aussi, travailler encore plus, et espérer que demain sera meilleur.
J'ai été au fond du trou, dans précipice plein de noirceur et de désolation.
La route aura été longue pour en sortir et ça n'aura pas été sans efforts, mais j'ai repris le droit de vivre.
Je n'ai plus de voile devant les yeux, je combats toujours et tous les jours.
La liberté est à ce prix et je crois qu'elle est à la portée de chacun.

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7 réponses


Profil supprimé - 22/01/2018 à 10h17

Bonjour François,

Je tenais à te remercier pour ce témoignage particulière poignant, empli de lucidité sur ton évolution jusqu'à ton abstinence et sur les problèmes générés par cette drogue.

Tu as fait le plus difficile du parcours,il reste bien évidemment encore à ne pas rester sur son passé, à lever des voiles, des regrets, apprécier le moment présent pleinement, tes enfants te le rendront au centuple.

Pour cette épreuve que tu cites avec ta compagne, je pense (enfin je le conçois comme ça personnellement), qu'il n'y a pas vraiment de hasard, tu étais arrivé certainement au point limite de non retour et tu as réagi positivement.

Si je puis me permettre, je te conseille un livre de Eckhart Tolle, "Le pouvoir du moment présent" qui a donné des clés à de nombreuses personnes pour s'épanouir au quotidien. Certaines autres n'y trouvent pas leur compte, mais tu pourras t'en faire une idée par toi-même.

Je te mets également le lien du site d'Olivier54150 sur lequel il y a beaucoup d'info, de liens pour avancer positivement.

http://olivierm54.wixsite.com/communications/news-and-events

Bon courage pour la suite.

Laurence

Moderateur - 22/01/2018 à 10h39

Bonjour François,

Je me joins à Almarita/Laurence pour vous remercier pour ce témoignage sensible et lucide. Il n'est pas donné à tout le monde de pouvoir faire un tel "examen de conscience". Bravo.

Si vous ne pouvez pas refaire le passé vous pouvez faire du mieux que vous pouvez dans le présent et pour le futur. Essayez de vous pardonner peut-être, comprenez que votre sensibilité, qui a pu vous jouer des tours hier, vous permet aussi d'avoir une richesse et une finesse particulières, que peu de personnes ont. Cela vous "décale" peut-être mais vous avez fait et vous faites encore le chemin pour que cela vous porte. Bientôt, peut-être déjà, vous saurez distribuer votre richesse autour de vous.

Bien cordialement,

le modérateur.

Profil supprimé - 22/01/2018 à 19h52

Je vous remercie de vos réponses.

En effet, il faut se tourner vers l'avenir, et poser, un à un, les pas qui mène vers une abstinence plus sereine.

Se sentir apaisé est vraiment salvateur, et je m'efforce de profiter de ces instants là.

Je ne donne qu'un conseil aux gens qui souffrent comme j'ai pu souffrir de cette addiction : parlez-en autour de vous, à vos amis proches, aux gens à qui vous pensez pouvoir vous confier.

Affirmer son abstinence, c'est un verrou supplémentaire pour ne pas rechuter, enfin, c'est mon avis.

Pour ceux ou celles qui n'en sont pas encore là, dites-vous que chaque pas dans cette direction est un pas de plus vers la liberté.
Ce ne sont pas de grands mots, ils ont du sens, car il faut se libérer d'une addiction, et ce n'est pas simple.

Je persiste à penser que c'est possible pour tout le monde.

Olivier 54150 - 24/01/2018 à 00h10

Bonjour,
François, je réagis à ton post car je m’y retrouve pas mal.
Ce passé nous hante, ce passé qu’on n’a gâché et surtout oublié ou pas vécu. c’est un sentiment...comment dire, de gachi.

Perso, j’ai pas vu grandir mes enfants alors que j'étais prêt d’eux, j’ai bu une demis maison, fait souffrir mes proches... C’est dur quand j’y repense. Bref

Trois ans, c’est long, c’est court, c’est vraiment bien. perso, j’ai mis 5 ans avant de pouvoir passer un noël ou un repas de famille sans souffrir d’une certaine injustice et ne plus ressentir cette furieuse envie de partager l’euphorie. Si ça nous lâchera un jour totalement ? Je ne sais pas, je ne crois pas, car tu vois, j’ai arrêté en 1988 et je suis là...

Je dit souvent qu’une fois alcoolique, ben y faut en faire son histoire.

j’ ai percuté sur t’as phrase : <<Affirmer son abstinence, c'est un verrou supplémentaire pour ne pas rechuter >>
Et bien sûr, je suis d’accord, et je voudrais aller plus loin.

Dès le départ, affirmer sa dépendance et un premier pas vers la guérison, c’est sortir du déni.

Et Jacques Salomé dit super bien: “Devenir adulte c’est quand le besoin d’affirmation a pris le pas sur le besoin d’approbation”.

S'intéresser sur les mécanismes de l’addiction et la dépendance (c'est pas la même) sur les astuces des alcooliers pour en vendre toujours plus. S’intéresser aussi à cette hypersensibilité qui fait de nous des accros à l’éthanol ou au thc, benzo et autre psychotropes reste pour moi le meilleur moyen pour apprivoiser cette drôle de vie sur le long terme.
Je ne sais pas si tu as lu cette article : Voici un extrait:

Ce que les gens ne voient pas d'emblée, ni les abstinents de fraîche date, ni le reste de la société, c'est qu'être alcoolique à vie est plus proche de la bénédiction que de la calamité. L'alcoolique qui durablement ne boit pas d'alcool, peut se rétablir dans tous les autres aspects de son existence et, souvent, avoir une vie meilleure que dans la partie alcoolisée. L'abstinence est le passage obligé qui lui permet de reconquérir qualité de vie, liberté, bien-être.

Mais, pour l'instant, l'image déplorable de l'abstinence occulte encore souvent cette perpective.

entier: http://leplus.nouvelobs.com/contr...vrage-c-est-l-abstinence-totale.html

Merci Laurence pour ton partage et celui de mon ptit site.
Merci au Modérateur de souligner l'importance de la sensibilité. Je pence de plus en plus que la dépendance à un psychotrope et une simple sensibilité mal exploité ou rejeté…

A bientôt
oliv


Profil supprimé - 26/01/2018 à 07h13

Bonjour Oliv

J'avais lu cet article, merci pour ce partage.

Je crois aussi que maintenant j'ai une vie différente des "autres", plus qualitative, plus lucide, moins limitée.

Il.ne faut pas se leurrer, l'abstinence ne se fait pas d'un claquement de doigt, il faut se forger sa volonté, et ça prend énormément d'énergie.

Certains auront besoin d'une aide médicale, d'autres non. Tous les moyens sont bons a partir du moment où ils nous correspondent.

Repenser à son passé, a ce qu'on a fait ou dit (quand on en a le souvenir...) fait mal, mais c'est aussi salvateur.
Quand la tentation vient, je me remémore les pires moments, les pires situations, les pires horreurs que j'ai pu dire, et ça calme l'envie immédiatement.

L'abstinence aura été un tournant, et pas que pour l'arrêt de l'alcool.
J'ai trouvé un défouloir efficace, je me suis mis au sport.
La course pendant un temps, puis la musculation de manière assez intensive. Ça m'a apaisé, et ça a changé ma vie et mon équilibre.
J'ai perdu du poids, beaucoup de poids, car l'alcool fait bien gonfler le ventre aussi.
Ce que j'ai gagné, c'est de l'estime pour moi même et l'envie de respecter, enfin, ce corps dans lequel je vis.

Il me reste le sommeil qui est compliqué. Depuis deux ans c'est très difficile de me reposer pleinement. Tout se mélange, entre ma dépendance, mes erreurs du passé, l'infidélité de ma femme, mes nuits sont parfois très courtes.
Je ne sais pas trop vers qui me tourner pour retrouver un peu de repos mais j'y travaille.

J'ai appris une chose, c'est déjà ça

Olivier 54150 - 26/01/2018 à 15h26

Si y à une chose que j’ai appris en en arrêtant l’alcool (en 98 et non en 88) j’suis pas si vieux que ça. bref. c’est que les problèmes en général sont la pour être réglé, pour nous faire avancer.

Qu’il ne faut surtout pas laisser s'envenimer les choses. (c’est ce que tu fait en écrivant ici) Lorsque je me sent coincé dans des pensés négatives, je me méfie de l’effet boule de neige qui peut nous entraîner dans une dépression.
Alors j’écris, met tout à plat pour mettre de l’ordre dans ma tête) S’il le faut, je vais voir mon médecin, un psy, un magnétiseur, peut importe. il ne s'agit pas de se gaver de médoc hein, mais plutôt d'exorciser un mal être en le comprenant.

Quelque que fois, il ne faut pas grand chose, un livre, une phrase, une rencontre, l'intérêt pour une nouvelle discipline...

N’en veux pas trop au passé, il est le résultat de ce que tu es aujourd'hui, c’est à dire quelqu’un de sobre, équilibré, en bonne santé avec un esprit ouvert. Ce n'était surement pas le chemin le plus simple mais le résultat en valait la peine; non ?

Pour le sommeil, je sais pas trop quoi dire, en tapant “problème de sommeil” sur Google il y a 5 millions de résultats alors je ne vais pas te conseiller une verveine. Peut-être sur youtube une méditation guidé de Stéphanie Renaud...les conseils de Thierry Casasnava…
On peut voir dans tes mots que tu es en pleine remise en question, et rien que pour ça tu ne peux aller que vers le mieux.
”La vie et une succession de naissances” Jacques Salomé.
A bientôt. Oliv

Profil supprimé - 07/02/2018 à 21h36

Bonjour

Il y a encore des hauts et des bas, même quand on ne s'y attend pas.

Il y a quelques jours, pour la chandeleur, des amis sont venus dîner avec des crêpes.
Du rhum dans la recette, je ne lainpas senti au début, puis ça a été permanent.

Ils n'avaient pas pensé à ça, à moi, et c'est normal.
J'ai passé une nuit horrible, il faut dire que j'appreciais particulièrement le rhum autrefois.

Un simple goût dans la bouche, et je me suis senti mal.

Je demanderais la recette la prochaine fois.

Comme quoi, je dois rester vigilant, il me faudra encore du temps pour être plus serein.

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