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J'ai peur pour mon père

Par efce29

Bonjour, je viens de rejoindre ce site car j'ai besoin d'aide, enfin plutôt mon père a besoin d'aide...
Mon père a 55 ans, il a toujours apprécié l'alcool, depuis que je suis petite c'est devenu une habitude pour lui de boire un verre de whisky avant de manger, "l'apéro" typiquement, mais quand la plupart d'entre nous le consommons de manière occasionnelle, c'était tous les soirs pour lui.
Il y a cinq ans, mon grand père, son père, nous a quitté d'un cancer de l'estomac, ça a été très compliqué pour tous le monde, mais ça l'a été encore plus pour lui, parce qu'il avait perdu sa mère 7 ans avant d'un AVC. Je ne sais pas ce qu'on peut ressentir dans ces moments car pour l'instant j'ai la chance d'avoir mes deux parents (même si j'ai peur que cela ne dure pas), mais j'imagine qu'il a dû avoir extrêmement mal.
Après le décès de mon grand-père, j'ai remarqué qu'il avait augmenté sa consommation d'alcool. Avant cela il attendait 19h que ma mère rentre du travail pour boire son "apéro", mais à cette époque il se servait un ou deux verres avant qu'elle rentre, rinçait son verre et faisait comme si de rien n'était. Il se servait son verre habituel au retour de ma mère. Je ne savais pas trop comment réagir, je n'étais qu'au lycée et même si j'aurais dû reconnaître les signes, je pensais que ce n'était "pas si grave". Je pense que j'étais un peu dans le déni car j'ai toujours adoré le fonctionnement de ma famille et j'avais peur que le fait de mettre un mot sur son problème nous affecte tous. Au bout d'une année ou deux j'ai commencé à en parler à ma mère, mais elle ne semblait pas s'en inquiéter, alors on n'a jamais rien dit.
Seulement les années ont passé maintenant, je suis diplômée d'une licence, mais rien n'a changé, c'est même pire.
Je suis rentrée me confiner chez mes parents, pour ne pas être seule et enfermée dans un 20m2. Début avril, c'était son anniversaire, on avait organisé un face time avec toute la famille pour l'occasion, je l'attendais sur la terrasse, et je l'ai vu rentrer dans son cabanon, y chercher quelque chose dans ses étagères, et quelques instants après il est ressorti Quand il m'a parlé, j'ai senti son haleine d'alcool. J'ai fait comme si de rien n'était et on s'est réunis sur la terrasse, lui, ma mère et moi pour ce fameux facetime d'anniversaire. Il a bu "l'apéro". Au cours de la soirée, quand il était encore une fois endormi sur le canapé à 21h, je suis sortie et j'ai été voir dans son cabanon. C'est là que j'ai trouvé, cachées derrière un seau, des bouteilles de vin, certaines vides, d'autres pleines. Je me suis mise à pleurer, les larmes coulaient toutes seules et il était impossible de les arrêter. Ça m'a fait extrêmement mal, tout ce que j'avais gardé pour moi et minimiser pendant des années me sauter maintenant au visage. Forcément, ma mère m'a entendue pleurer, et j'ai bien été obligée de lui raconter. Je lui ai montré les bouteilles, et je sais que ça lui a fait mal. On ne savait pas pourquoi il buvait, pourquoi il avait tant ce besoin de boire pour pouvoir passer un moment avec nous. Je me suis demandée si je le décevais. Ma mère s'est demandée s'il l'aimait encore. C'était une très mauvaise soirée, on s'est beaucoup remises en question, mais je suis persuadée que nous n'y sommes pour rien. Enfin bref, le lendemain je suis partie avec des copains pour la journée, en rentrant le soir, ma mère m'a expliquée qu'elle avait mis mon père face aux faits, qu'elle lui avait sorti les bouteilles et qu'elle lui avait demandé des explications. Il lui a dit que c'était des vieilles bouteilles de son père et qu'il n'était pas alcoolique ou je ne sais quoi, je ne me rappelle plus très bien. Elle avait fait le choix de vider les bouteilles et de les jeter. Après ça, s'en sont suivies des semaines où il ne parlait plus à ma mère, et quand il le faisait il était très méchant. Ça m'a fait mal pour elle, je sais qu'elle veut juste l'aider et que c'est pas facile, et lui était vraiment exécrable avec elle. Ça a commencé à aller mieux après le confinement, moi j'étais partie une semaine dans mon appartement histoire de me retrouver un peu seule et loin de tout ça. Quand je suis rentrée chez mes parents tout allait mieux, mon père reparlait à ma mère comme s'il ne s'était rien passé, il avait l'air de moins boire, tout était parfait. Mais j'ai toujours prévenu ma mère que ça n'était qu'une illusion, qu'après tant d'années il n'allait pas s'arrêter d'un coup, et j'avais raison. Il y a quelques semaines je l'ai surpris à se servir son whisky avant que ma mère rentre du travail, des verres pleins, purs. Et hier, nouveau drame. Je trouvais qu'en ce moment il jardinait beaucoup, tout le temps dehors, et je trouvais ça bizarre parce qu'il n'a jamais vraiment adoré le jardinage. J'étais sur la terrasse, et entre deux bruits d'arrosoir, j'entends le couvercle d'un énorme seau de sable qu'on a sur le côté de la maison se tourner, et quelques instants après, le couvercle se referme, et mon père se remet à arroser ses plantes. La soirée passe, et à nouveau, quand il était endormi à 21h sur le canapé, je décide d'aller vérifier ce seau, en espérant de tout mon cœur me tromper. En ouvrant le couvercle, j'ai découvert une bouteille de whisky vide, et dans un sac poubelle, il y en avait une pleine encore fermée. J'en ai donc parlé à ma mère qui se trouvait sur la terrasse avec moi à ce moment là, on en a rit nerveusement au début, mais après on ne rigolait plus du tout. On a toutes les deux peur de le confronter, mais on ne veut pas qu'il se tue la santé encore plus.
J'ai déjà perdu énormément de personnes dans ma vie et je n'ai que 20ans, je n'ai pas envie de perdre mon père. J'ai envie qu'un jour il connaisse ses petits enfants. J'ai envie qu'il m'accompagne jusqu'à l'autel le jour de mon mariage. J'ai besoin de mon père mais j'ai l'impression que dans tous les cas je vais le perdre, soit d'une maladie si je me tais, soit parce qu'il ne voudra sûrement plus me parler si je lui en parle. Je ne sais pas quoi faire, c'est extrêmement douloureux pour moi de faire face à ça. Je pars en vacances lundi pour une semaine, je pensais lui écrire une lettre en lui disant tout ce que je ressentais et la glisser dans le seau avant mon départ, mais plus j'y pense et plus cette idée me terrifie.
J'ai peur pour lui, parce qu'il boit trop, parce que chaque soir il nous dit des choses dont il ne se rappelle pas le lendemain, parce que certains soirs il prend la voiture pour aller récupérer ma mère alors qu'il a de l'alcool dans le sang, parce que j'ai déjà perdu trop de personnes et que je refuse de le perdre lui.

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1 réponse


Marie-Men50 - 29/07/2020 à 15h27

Bonjour efce29,

Je me permets aujourd'hui de t'écrire, car ton histoire m'a beaucoup touché. J'ai bien pris le temps de te lire, et même si nous ne vivons pas exactement la même chose, nous partageons malgré tout certains ressentis - nos histoires respectives se rejoignent sur certains points.

Si tu souhaites connaître mon parcours, j'avais écris un message intitulé 'un grand frère alcoolique' en début d'année. Mais si je t'écris aujourd'hui, c'est surtout pour te dire que tu n'es pas seule. Que ce que tu as pu ressentir en découvrant les bouteilles dans le cabanon ou bien dans le seau, c'est quelque chose que je connais aussi. Que je connais bien trop à mon goût d'ailleurs. On se sent démunies, on s'effondre. La dernière fois que je suis tombée face à une bouteille de rhum appartenant à mon frère, il aurait pu passer une tornade à côté de moi je ne l'aurai pas vu.

Moi aussi, j'ai écris une lettre que j'ai carrément collée sur la bouteille en question. J'étais épuisée. Perdue. Mais avant que mon frère ne revienne, j'ai retiré la lettre et l'ai mise au feu. J'étais paniquée, j'ai eu peur qu'il lise les mots que j'avais peiné à écrire. Je n'ai finalement pas pu lui faire part de ce que je ressentais. Je ne m'en sentais plus capable. Je me suis écoutée.- j'ai écris, j'ai déposé la lettre, puis finalement je l'ai reprise, je l'ai lu environ 2000 fois, et l'ai jeté dans la cheminée. Nous ne pouvons pas tout supporter, ni même nos propres mots parfois. Peut-être que j'écrirais une prochaine fois.

Je ne sais pas si toi, à ce jour, tu as pu déposer cette lettre. Dans tous les cas, tu as fait ce qui te semblait important et nécessaire à ce moment précis. Ecoute-toi. Préserve-toi. Tu as 20 ans, et tellement de jolies choses à construire.

Lorsque ta mère a parlé à ton père, il n'a pas pu faire autrement que de faire face à ce problème qui pour lui, n'en n'est pas un pour le moment. Il s'agit du déni, pour lui il n'est pas alcoolique, il ne voit pas ce qui cloche. Mais la colère et l'irritabilité montrent bien qu'il se passe malgré tout quelque chose chez ton papa. L'acceptation de la maladie est un vrai travail personnel, et ne peut se faire du jour au lendemain. Parce qu'accepter, c'est admettre que nous ne pouvons pas tout gérer seul. C'est admettre que nous avons besoin d'aide et donc, que nous avons quelques fragilités... Et j'imagine que pour un père, cela doit être d'autant plus difficile à concevoir.

Mais tu es là, ta maman est là. Tu as l'air d'être proche de tes parents. Je tiens simplement à te dire que tu n'es en aucun cas responsable de cette situation. Tu fais ce que tu peux pour soutenir ton papa, tu es là et saches que pour lui, c'est tellement précieux.

Je tenais également à te dire que certes il s'agit d'une maladie terrible, envahissante... mais en aucun cas elle ne définit ton papa. J'ai mis beaucoup de temps à comprendre ça de mon côté, et ce n'est pas encore gagné à l'heure actuelle, mais ça me permet malgré tout de mieux vivre les moments passés avec mon grand frère.

Je comprends tes craintes, je les connais. Mais laisse toi le temps, laisse lui le temps de comprendre ce qui se passe. Et un jour, tu lui exprimera peut-être ce que tu as écris ici.

J'espère que mon message aura pu t'apporter quelque chose... et j'espère qu'à ce jour, tout va bien de ton côté.

A bientôt peut-être,

Marie.

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